L’histoire du Collège Jean-de-Brébeuf

Les balbutiements

En 1848, la communauté religieuse de la Compagnie de Jésus, désireuse de contribuer à l’éducation des jeunes Québécois, fonde le Collège Sainte-Marie sur la rue Dorchester à Montréal.

Dès les débuts du 20e siècle, les locaux de l’établissement deviennent trop exigus pour la clientèle du Collège qui ne cesse d’augmenter. Se voyant dans l’impossibilité d’agrandir les lieux, les jésuites envisagent la possibilité de déménager une partie de leurs activités vers un site plus tranquille, en périphérie du centre urbain, où ce sera possible de bâtir un nouvel internat pour garçons.

C’est dans ce contexte qu’en 1909 le Collège Sainte-Marie conclut l’achat de la ferme Leslie dans le village de Côte-des-Neiges. Les circonstances économiques et la Première Guerre mondiale retardent toutefois le projet des jésuites. Aussi, ce n’est qu’en 1927 qu’est entamée la construction des premiers bâtiments du futur Collège Jean-de-Brébeuf, nommé en l’honneur du plus célèbre des martyrs canadiens.

Le 12 septembre 1928, le Collège accueille ses premiers élèves et, dès 1929, signe avec l’Université de Montréal une entente qui lui confère un statut spécial; il est désormais autorisé à décerner le baccalauréat ès arts.


Les premières décennies

Dès sa création, le Collège Jean-de-Brébeuf se situe dans la tradition jésuite de l’enseignement, même si à cette époque son corps professoral n’est constitué qu’au tiers d’ecclésiastiques. À partir de 1932-33 toutefois, et pendant 28 ans, les jésuites y seront majoritaires, atteignant même un sommet de 67,8 % en 1938-39.

Alors réservé aux garçons et aux jeunes hommes, le Collège Brébeuf offre pendant de nombreuses années le cours classique menant à l’obtention du baccalauréat ès arts. S’étalant sur huit ans, ce dernier comprend le cours de grammaire (4 ans), le cours de lettres (2 ans) et le cours de philosophie-sciences (2 ans).

À cette époque, l’apprentissage des langues occupe une place prépondérante du programme scolaire. L’étude du français, comme celle du latin et du grec, est très poussée et porte sur de nombreux aspects (vocabulaire, grammaire, analyse logique, etc.)

Les mathématiques, l’histoire, l’anglais, la géographie, l’histoire naturelle, la chimie, la physique, la cosmographie, la mécanique, l’économie sociale et la comptabilité font également partie des matières enseignées à Brébeuf.

Fait intéressant, le programme éducatif des jésuites, qui accorde une grande importance à l’activité physique, met à profit l’environnement du Collège. L’hiver, les jeunes font du ski sur la montagne et profitent des patinoires, alors que par temps doux, ils s’époumonent sur la piste d’athlétisme.

La fin du cours classique

Dans les années 1960-70, l’éducation au Québec subit d’importants changements et Brébeuf n’y échappe pas.

En 1960, les jésuites proposent à l’Assemblée législative de fusionner les corporations du Collège Sainte-Marie et du Collège Jean-de-Brébeuf pour constituer une nouvelle université et ainsi répondre à l’accroissement des effectifs étudiants dans la région de Montréal. Leur projet repose sur la création d’une institution d’enseignement supérieur axée sur les sciences humaines et l’interdisciplinarité, quoique dénuée de facultés de droit et de médecine.

La mise sur pied en 1961 par le gouvernement du Québec de la Commission royale d’enquête sur l’enseignement, laquelle est censée révolutionner le système d’éducation de la province, convainc toutefois les jésuites de ne pas aller de l’avant avec leur projet.

Les années qui suivent marquent pour Brébeuf une transition imposée par la création du réseau des cégeps. En 1968, l’établissement commence à offrir le nouveau programme collégial. Puis, en 1972, il abandonne définitivement l’enseignement du cours classique.

Simultanément, la mixité est instaurée à Brébeuf. En 1968, les jeunes femmes sont admises au Collège à partir des classes de Belles-Lettres et, en 1969, elles le sont dès la 5e secondaire.


Le Collège se laïcise

À la suite des réformes des années 1960, et à l’instar des autres établissements scolaires dirigés par des communautés religieuses, le Collège Jean-de-Brébeuf laïcise progressivement son corps enseignant.

Le 3 janvier 1983, dans une lettre qu’il adresse au directeur général de Brébeuf, le supérieur provincial des jésuites signale l’incapacité de la Compagnie de Jésus à poursuivre son engagement auprès du Collège. Il spécifie toutefois ceci : « Nous voulons que notre œuvre d’éducation se poursuive et nous travaillerons dans la mesure de nos moyens à rendre possible une prise en charge responsable par des laïcs convaincus et compétents. »

Ainsi, le 20 novembre 1986, la Compagnie de Jésus transfère le Collège Brébeuf à une corporation laïque. Le dernier directeur jésuite, le père Rodolphe Tremblay, reste toutefois en poste jusqu’en 1991. Parallèlement, la proportion de jésuites faisant partie du personnel ne cesse de diminuer, atteignant en 1988-89 un taux de 5 %.

Depuis cette transition importante, le Collège Jean-de-Brébeuf poursuit sa mission éducative dans le respect de ses origines. Si son corps enseignant ne compte plus de jésuites parmi ses rangs, son conseil d’administration est encore doté de deux membres de la Compagnie de Jésus : les pères Bernard Bélair et Michel Lefebvre.

Aujourd’hui, le Collège Brébeuf offre un continuum de sept années d’études préuniversitaires au sein du même établissement. Bien ancré dans son époque, il accueille maintenant les jeunes filles aux premiers niveaux du secondaire, mais leurs classes ont lieu dans une section distincte de celle des garçons, le pavillon Vimont. Les élèves partagent certains espaces communs, comme la bibliothèque et la cafétéria, ce qui favorise leur socialisation à certains moments de la journée.


L’architecture du Collège Brébeuf, ses bâtiments et ses installations

C’est entre le printemps 1927 et l’automne 1928 que les premiers bâtiments du Collège Jean-de-Brébeuf sont érigés d’après des plans dessinés par le père Félix Martin. Ils comprennent, en plus d’un pavillon principal, une résidence pour les religieux.

Pour superviser la construction de cet ensemble immobilier, les jésuites choisissent les architectes Dalbé Viau et Louis-Alphonse Venne, lesquels sont reconnus pour avoir conçu une partie de l’Oratoire St-Joseph. En collaboration avec l’architecte Alphonse Piché, ils mènent à bien le projet en un peu moins de 18 mois.

Ayant la forme d’un « T », le pavillon principal du Collège est réalisé dans le style néo-Renaissance. Recouvert de pierre lisse et de pierre rustiquée, il comprend un corps central doté de trois avant-corps en façade et il est complété par trois ailes en retour d’équerre. En plus de rappeler le palais de Buckingham en Angleterre, l’architecture monumentale de ce bâtiment confère au Collège énormément de prestige.

De forme rectangulaire, la résidence des religieux est pour sa part implantée perpendiculairement à l’aile arrière du bâtiment central. Portant le nom de pavillon Vimont, elle est tournée vers la montagne et offre, à l’époque de sa construction, une vue sur le milieu naturel environnant.

Quelques années à peine après l’aménagement de ces deux immeubles, la direction du Collège envisage déjà des agrandissements, car celui-ci est très fréquenté. D’après les jésuites, l’absence d’une salle académique, d’un gymnase et d’une résidence pour étudiants commande une nouvelle construction. Toutefois, la crise économique des années 1930 et l’avènement de la Seconde Guerre mondiale retardent le projet.

En 1953, l’architecte Roland Dumais conçoit un plan d’ensemble d’un véritable campus comprenant un auditorium, un philosophat, une bibliothèque, un aréna et un gymnase. Ces pavillons seront pour la plupart érigés entre 1956 et 1974, mais ils seront conçus par des architectes différents et ne seront pas nécessairement fidèles aux ébauches de Dumais.

Cette deuxième phase majeure d’aménagement du Collège débute en 1956 avec la construction du pavillon Lalemant, qui est inauguré en septembre 1957. Imaginé par les architectes Brais, Savard et Despatie, celui-ci est implanté un peu à l’écart du bâtiment principal, auquel il est au départ relié par un tunnel souterrain. Multifonctionnel, l’édifice de huit étages abrite notamment une bibliothèque, des laboratoires, des studios d’art et des résidences étudiantes.

En 1965 et 1966, le pavillon Lalemant est agrandi vers l’arrière. Grâce à ces travaux, le Collège compte désormais un gymnase et une salle de spectacle, la salle Brébeuf.

En 1974, un aréna s’ajoute à l’ensemble et vient clore cette première période d’expansion. Conçu par l’architecte Jacques Morin, le bâtiment fonctionnaliste1 permet enfin aux collégiens de pratiquer les sports sur glace en toute saison.

Pendant plus de 30 ans, Brébeuf n’entreprend aucun projet de nouvelle construction. Toutefois, en 2003, des travaux de restauration sont entamés dans l’ancienne chapelle du Collège afin de pouvoir accueillir adéquatement la bibliothèque de théologie de la Compagnie de Jésus. Des systèmes électromécaniques permettant le contrôle de la température et assurant la conservation appropriée des livres rares y sont installés et l’acoustique de la chapelle est modifiée afin de répondre correctement aux besoins inhérents à une salle de lecture. Des salles de travail très lumineuses y sont également aménagées.

C’est le consortium d’architectes Beaupré, Michaud, Dupuis et LeTourneux qui est responsable de cette transformation majeure. En 2004, le projet reçoit le prix Orange de Sauvons Montréal puis, en 2005, il se mérite le prix d’excellence de l’Ordre des architectes du Québec dans la catégorie recyclage.

En 2010, le Collège se dote d’un nouveau complexe sportif, le pavillon Coutu. Conçu par la firme Menkès Shooner Dagenais LeTourneux, celui-ci est érigé entre la salle Brébeuf et le pavillon Lalemant. S’intégrant de façon très naturelle au site existant, il comprend un gymnase double, une salle d’entraînement, des vestiaires, une salle d’escrime et des locaux administratifs.

En 2012 et 2013, le pavillon Vimont, qui a depuis sa création logé les jésuites, est entièrement rénové afin de pouvoir accueillir les jeunes filles. Les nouveaux locaux, très modernes, incluent notamment une bibliothèque, de nombreuses classes, un local d’informatique, des laboratoires pour les cours de physique et de chimie ainsi qu’une salle de récréation.

En 2014, pour améliorer ses installations sportives, le Collège fait aménager un terrain multisport à surface synthétique aux abords de son pavillon principal. Nommé en l’honneur du père Lefebvre qui a œuvré à Brébeuf pendant plus de 45 ans, ce nouvel espace porte le nom de Michel-Jim-Lefebvre.

En octobre 2015, Brébeuf inaugure la salle Jacques-Maurice, un amphithéâtre moderne et bien équipé pouvant accueillir 601 personnes. Ce dernier remplace la salle Brébeuf dont les installations n’étaient plus au goût du jour.1Réfère au fonctionnalisme, principe architectural qui a vu le jour au 20e siècle.


Le blason du Collège Jean-de-Brébeuf

« Viam veritatis elegi », tirée du psaume 119 de la Bible (verset 30), signifie « J’ai choisi la voie de la vérité ».

Le blason du Collège Jean-de-Brébeuf est formé de deux écussons inspirés de ceux de la famille de saint Ignace de Loyola, fondateur de la Compagnie de Jésus.

Sur la partie gauche, dont l’arrière-plan est rouge pour rappeler le martyre de Jean-de-Brébeuf, on trouve deux loups dressés auprès d’une marmite posée sur le feu. Il faut savoir que cette figure apparaissait au-dessus de l’entrée du manoir de la famille Loyola, situé à Azpeitia, non loin de San Sebastian dans la province basque de Guipuscoa. Selon certains, le choix de ces effigies constituerait un rappel du patronyme Loyola, puisqu’en espagnol, lobos et olla signifient respectivement loups et marmite. Cette interprétation est toutefois contestée puisque plusieurs doutent qu’une famille basque ait adopté un emblème conçu d’après une forme espagnole de son nom. Ces derniers voient plutôt dans la marmite un symbole de la large hospitalité dont la famille Loyola se faisait un point d’honneur.

L’écusson de droite du blason de Brébeuf, qui est de couleur bleue et qui est serti de six bandes dorées, fait pour sa part référence au nombre de hauts faits d’armes et de citations militaires obtenues par les braves de la famille Loyola.

En ce qui a trait à la forme de l’écu et du cimier (figure au haut de l’effigie), elle est empruntée au blason de la famille d’Odet d’Orsonnens, en souvenir du premier recteur de Brébeuf.

Quant à la devise du Collège qui se trouve sur le listel au bas du blason, « Viam veritatis elegi », elle est tirée du psaume 119 de la Bible (verset 30) et signifie « J’ai choisi la voie de la vérité ». C’est le père d’Orsonnens qui, quelques semaines avant l’ouverture de l’établissement en 1928, a choisi cette dernière.


Les recteurs et directeurs généraux du Collège Jean-de-Brébeuf

Recteurs

  • 1928-32 : P. Yvan d’Orsonnens
  • 1932-38 : P. Oscar Bélanger
  • 1938-43 : P. Antonio Dragon
  • 1943-47 : P. Jean Laramée
  • 1947-52 : P. Lucien Thibodeau
  • 1952-57 : P. Paul Vanier
  • 1957-59 : P. Roger Cantin
  • 1959-65 : P. Roland Fortin
  • 1965-74 : P. Georges Legault

Directeurs généraux

  • 1974-75 : P. Georges Legault
  • 1975-81 : P. Laurent Larouche
  • 1981-91 : P. Rodolphe Tremblay
  • 1991-96 : M. Benoît Lauzière (premier directeur laïque)
  • 1996-08 : M. Jean-Claude Gaudet
  • 2008-18 : M. Michel April
  • 2018-.. : M. Luc Thifault

Bibliographie

Ville de Montréal. « Paysage du Collège Jean-de-Brébeuf ». In Le site officiel du Mont-Royal. En ligne. Consulté le 18 août 2016.