La triste nouvelle est tombée le 1er juin 2020 : l’ancien pensionnaire, Louis-Philippe Rondeau, s’est éteint à l’âge de 91 ans. Le membre du conventum 1948 au Collège Brébeuf a fait son cours classique auprès de confrères tels que l’astrophysicien Hubert Reeves ou encore le chanteur lyrique, Joseph Rouleau.

Nous vous racontons la belle histoire d’un « pilier du Collège », un grand homme qui a notamment pavé la voie à ses enfants, Michel et Isabelle, tous les deux diplômés de Brébeuf, en 1974 et 1983.

Photographie de classe, Belles lettres A, 1945-1946 :
Louis-Philippe Rondeau (cercle bleu); Joseph-Alfred Rouleau (polygone jaune); Hubert Reeves (carré vert).

La Correspondance de Voltaire

À une heure de route du Collège Jean-de-Brébeuf, est né Louis-Philippe Rondeau à Marieville en Montérégie, le 16 mars 1929. Par le biais d’un oncle maternel jésuite, M. Rondeau est entré par la grande porte du Collège Brébeuf, dont la formule classique a fait de lui un fervent amateur de grands auteurs français. Et un francophile de surcroît.

Lui et sa femme, feu Huguette Martel, ont commencé à voyager très tôt, à une époque où à peu près personne ne voyageait encore. Ils ont ratissé la France de long en large et ont séjourné pas moins de 18 fois à Paris, de 1958 à 1996.

Mais M. Rondeau n’a pas fait que voyager à bord d’une Citroën deux chevaux, comme on en voit dans les films d’époque français. Il lisait aussi, et beaucoup. Charles de Gaulle, les rois de France… Sa fille, Isabelle, est même tombée sur La Correspondance de Voltaire récemment, alors qu’elle faisait le tri de la maison familiale. Sans grand étonnement.

Elle était un peu plus surprise cependant, lorsqu’elle fut la découverte d’un paquet de lettres manuscrites que son père échangeait, dès l’âge de 16 ans, avec sa mère.

Aussi romanesque que cela puisse paraître, les lettres sont datées d’entre 1945 et 1953, soit jusqu’à l’année où l’idylle a naturellement convergé vers le mariage. La petite histoire veut par ailleurs que M. Rondeau ait fait passer « l’amour de sa vie » pour « sa cousine » pendant un temps, afin de pouvoir recevoir ses lettres, et ainsi se conformer aux règles de l’institution catholique.

La prose ludique de ses confrères

L’ancien journal étudiant, Le Brébeuf, un mensuel de huit pages, publié pendant 38 ans, de 1934 à 1972, et qui est très littéraire, en dit long sur l’époque du cours classique.

Dans des pages d’une publication datant de 1946, des confrères de M. Rondeau, qui ont assurément le sens de la formule, lui livre un peu à l’instar de ce que l’on trouve dans nos albums de finissants aujourd’hui, le petit mot suivant :

Élégant bureaucrate à profil Louis XIV;

administrateur compétent et fiable.

Meneur sportif, d’esprit seulement.

Des amis partout, même chez les Pères.

Dans une autre publication de 1948, alors que M. Rondeau est administrateur du journal cette année-là, on le dépeint alors sans vergogne comme suit :

Subtil et heureux diplomate, Louis s’est fait l’interprète de Jean Narrache auprès des autorités du Collège.

Se mêle à tout, indispensable, pilier du collège, Philippe fera sûrement son chemin dans la gloire!

70 ans plus tard…

À l’été 2019, soit plus de 70 ans après sa graduation, Louis-Philippe Rondeau est retourné au bras de sa fille sur le campus du Collège. Des étoiles dans les yeux, il a pointé la fenêtre de la chambre où il dormait à la fin de son de cours classique…

« J’ai vu que pour lui, c’était vraiment de belles années. C’était une institution dont il était très, très fier d’être diplômé. Connaissant son attachement à Brébeuf ni moi ni mon frère n’étions surpris de son legs testamentaire. Je pense qu’il se sentait redevable d’être l’homme qu’il était devenu grâce à sa formation ; et qu’il avait à cœur la pérennité du Collège. » — Isabelle Rondeau, avocate de formation et fille de Louis-Philippe Rondeau

M. Louis-Philippe Rondeau, diplômé de Brébeuf en 1948 et donateur par voie testamentaire à la Fondation du Collège Jean-de-Brébeuf

Paix à ton âme, ami Brébeuf

En plus de nos plus sincères condoléances à tous les proches, toute l’équipe du Collège Jean-de-Brébeuf tient à remercier l’immense foi de Louis-Philippe Rondeau en l’avenir de notre institution.

Nous remercions également de tout cœur, Isabelle et Michel Rondeau, pour avoir fait preuve d’une grande bonté, en nous ouvrant une fenêtre sur quelques pans de vie de leur père, qui nous a inspiré ce texte-hommage.

Une vie équilibrée

S’il a d’abord aimé les quilles du temps qu’il y avait des allées au Collège, Louis-Philippe Rondeau est également un homme qui a su s’accorder du temps dans la vie au fil de sa carrière. Grand voyageur bien sûr, il a été un fana de tennis, mais aussi grand joueur de Golf jusqu’à ses 88 ans!

« Humble », « minutieux », « extrêmement systématique » et « très organisé », c’est ainsi que ses enfants le décrivent aujourd’hui. C’était un comptable, rappelons-le. Il a notamment fait partie du comité de rédaction de l’examen de l’Ordre des comptables agréés à un moment de sa vie. En plus d’avoir été professeur à HEC Montréal de 1956 à 1968. Il a aussi été associé du cabinet d’experts-comptables Raymond Chabot Grant Thornton. Comme membre du Comité exécutif de 1966 jusqu’à sa retraite en 1991. Mais aussi comme directeur général durant ses dernières années professionnelles.

Une école tissée serrée

Preuve que le Collège Jean-de-Brébeuf est une école tissée serrée, la famille d’Isabelle Rondeau, mariée à Me Pierre Barsalou, avocat spécialisé en droit fiscal, « est très Brébeuf! », dit-elle. Les trois enfants de son mari y sont gradués. La conjointe de l’aîné y est allée aussi. Et le mari de la fille de M. Barsalou, Jean-François Bouquet, est présentement professeur de français au secondaire à Brébeuf. « On taquine mon mari parfois, en lui disant : il y a bien juste toi qui n’y es pas allé ! Mais il a une bonne excuse, s’amuse Isabelle, il vivait en Outaouais à l’époque. »

Louis-Philippe Rondeau arbore un nœud papillon sur cette photo prise lors d’un tournoi de crosse. Le cliché a été trouvé après son décès, les détails du contexte demeurent inconnus.