C’est dans un village du Grand Nord d’un peu plus de 800 habitants, Kangiqsujuaq, qu’un groupe de 14 élèves de 5e secondaire est allé séjourner dans le cadre d’un échange avec des jeunes de l’école Arsaniq. Lors de ces moments singuliers, ces élèves ont pu découvrir une culture aux multiples richesses, mais surtout des gens qui ont su leur communiquer leurs valeurs et leurs passions à travers une foule d’activités. Les ambassadeurs du groupe, Zarina et Olivier, ont partagé avec nous leurs meilleurs moments, leurs impressions et leurs apprentissages. Les accompagnateurs Samuel Couture-Brière et Chloé Guérin-Gosselin nous livrent aussi leurs impressions de cette expérience unique.

Après un long et rigoureux processus de formation préalable au départ, notre groupe de 14 élèves de 5e secondaire a finalement pu vivre la première phase de l’échange avec le village de Kangiqsujuaq, au Nunavik. Nous revenons tous et toutes transformés par cette merveilleuse expérience. Les élèves ont fait preuve d’énormément de maturité émotionnelle, de curiosité intellectuelle et d’ouverture d’esprit dans un contexte où le territoire, la culture, le rythme de vie et les codes sociaux sont très différents des nôtres. À travers nos rencontres, nous avons pu découvrir toute la richesse culturelle des Inuits, leur incroyable résilience et le génie technologique qui ont permis à ce peuple de vivre depuis des millénaires dans l’immensité nordique. En plus des rencontres interculturelles et du volet plein air et aventure du séjour, nos élèves ont vécu une expérience spirituelle marquante. Loin de nos cellulaires et parachutés dans l’infini de la toundra arctique, nous avons pu ralentir, nous retrouver dans l’instant présent et entretenir des liens plus authentiques les uns avec les autres. Nous avons très hâte d’accueillir les élèves inuits à Montréal du 8 au 15 avril prochain. Nous espérons leur offrir un accueil aussi riche et bienveillant que celui qu’ils nous ont offert à Kangiqsujuaq!

Samuel Couture-Brière & Chloé Guérin-Gosselin

Je n’ai jamais vu quelque chose d’aussi beau de ma vie! Il y avait du blanc à perte de vue, le soleil était sorti, le ciel était bleu, c’était tellement paisible.

Olivier
Lumière unique et exceptionnelle

Je pense que c’est un des sentiments qu’on a le plus ressenti durant tout le voyage, que ce soit au village ou au parc : c’est cet esprit de communauté que j’ai apprécié. Tout le monde est tellement prêt à s’entraider, c’est quelque chose qu’on ne voit pas nécessairement ici à Montréal, où l’on vit davantage chacun pour soi. Mais là-bas, c’est le contraire, tout le monde s’aide parce que c’est ce qu’il faut faire pour survivre dans ce climat. C’était vraiment incroyable; moi j’ai vraiment aimé ce sentiment de partage!

Le grand départ vers le parc des Pingualuit

On a passé quatre jours dans le parc des Pingualuit, c’était peut-être les quelques jours les plus marquants pour certains. […] On y est allé avec cinq guides, des personnes incroyables, qui nous ont appris à pêcher, ils ont construit un igloo avec nous et on a eu la chance d’y passer une nuit.

Une journée, on est allé pêcher et quelques-uns d’entre nous ont attrapé des poissons. Mary, l’ancienne mairesse du village qui travaille maintenant au parc, nous a montré comment les découper avec un ulu. C’est un couteau en demi-lune qu’ils utilisent pour couper la viande. Elle nous a coupé du poisson en morceaux et c’était la première fois que nous goûtions de la nourriture traditionnelle. Je pense que tout le groupe a vraiment apprécié. On a mangé la chair avec la peau, il y en a qui ont mangé les yeux. C’était de l’omble chevalier et c’était délicieux!

[…] On sortait le poisson du lac, on allait au refuge, on vidait le poisson puis on le mangeait. Il s’écoulait trente minutes entre le moment où l’on pêchait le poisson et celui où on le mangeait. Et quand on l’attrape, il fait tellement froid que le poisson gèle en moins d’une minute! Il se conserve lui-même sur-le-champ. Quand on brise la glace pour faire un trou dans l’eau pour pêcher, l’eau gèle continuellement et il faut retirer la glace qui se reforme. […]

Ils ont aussi un congélateur communautaire où tous les chasseurs y mettent la viande qu’ils chassent. La viande est partagée avec le reste de la communauté : les familles qui en ont besoin peuvent se servir.

La pêche, la découpe au ulu et la dégustation du poisson
Construction de l’igloo où quelques membres du groupe ont pu dormir une nuit

Un qulliq est un bol façonné en pierre à savon. Mary nous a expliqué que ces bols étaient utilisés dans les igloos comme source de chaleur, pour chauffer, pour se réchauffer et aussi pour cuisiner. Pour allumer le feu, ils se servent de gras de béluga et de lichen séché. Ils disposent d’une technique spéciale pour répartir le gras sur le lichen, et garder le feu vivant n’est pas de tout repos! Certains élèves ont eu la chance de le faire.

La découverte du qulliq et son précieux feu

Nous avons aussi été initiés à un jeu avec des os d’animaux. Chacun des os représente quelque chose : les petits os sont associés aux femmes, les plus grands aux hommes, d’autres aux chamans et les très petits aux chiens. Tous les os sont disposés dans un sac et on y plonge une corde munie d’un petit nœud en son extrémité. Le but de cette activité est de récupérer un ou plusieurs os. Si, par exemple, on pige un homme, on dit ce que ça représente dans notre vie.

Je pense que le voyage a vraiment poussé le groupe à engager des réflexions différentes, à repousser les limites de nos connaissances.

zarina

Au parc, on a appris beaucoup de choses au niveau culturel et certains d’entre nous ont eu la chance d’apprendre à faire du perlage sur de la peau de phoque. Un jour que sévissait un rude blizzard et que nous ne pouvions pas vraiment sortir, je suis demeurée assise au même endroit pendant six heures à faire une seule boucle d’oreille! C’était tellement méditatif : j’ai commencé à le faire puis je ne me suis même pas rendu compte du temps qui avait passé…

Après-midi perlage

Ils nous ont aussi appris que, contrairement à ce que nous connaissons au Sud, dans la culture inuite, quand tu es prêt à commencer quelque chose, tu le commences. Il n’y a pas de pression, pas de limite d’âge selon laquelle, par exemple, à l’âge de 12 ans, il faut avoir terminé sa 6e. Tout ça ne fait pas partie de leur réalité. […] Un professeur de là-bas, un Français, m’a dit : « Ici, c’est vraiment un jour à la fois. » Tu fais quelque chose quand tu es prêt à le faire. J’ai beaucoup apprécié cette attitude moins intense. Madame Guérin-Gosselin a dit : « Ici, nous nous trouvons vraiment dans un espace spatio-temporel à part. »

Je ressors de cette aventure avec une connaissance de ce peuple qui m’a aidé à mieux connaître moi-même.

olivier

Tout cela m’a vraiment fait penser à la façon dont je vis ma propre vie. On complique parfois les choses, alors que l’on peut vivre simplement et être tout de même heureux. […] L’aspect communautaire m’a marquée… Là-bas, les valeurs communautaires, ce sont des valeurs que je connais peut-être avec ma famille ou avec certains de mes proches ici. Je trouve que ces valeurs ne sont pas suffisamment répandues dans les grandes villes et même au niveau individuel. Elles sont omniprésentes là-bas et j’ai été absolument ravie de voir ça!

J’ai éprouvé là-bas un sentiment de joie différent de tout ce que j’ai connu auparavant.

zarina
Le plaisir de goûter et de cuisiner ensemble

J’ai ressenti que Mary était vraiment fière de partager tout cela avec nous et que nous appréciions ses enseignements. Je suis vraiment fière, car en tant que groupe, tout le monde a vraiment participé à fond aux activités.

Le 8 avril, le groupe accueillera leurs homologues du Nunavik pour une aventure montréalaise. En plus de leur faire découvrir leur milieu de vie au Collège, un programme complet a été prévu : restaurants, Laser Quest, match des Canadiens, spectacle de l’OSM, cabane à sucre, planétarium et bien plus! Quant à Zarina, Olivier et quelques-uns de leurs collègues, ils aimeraient retourner à Kangiqsujuaq dès cet été pour participer à la vie de cette belle communauté en y effectuant un travail d’été. Ce serait aussi l’occasion pour eux de vivre une autre saison dans ce vaste territoire.

L’aventure se poursuit!