Cette année marque la quatrième édition d’un voyage au Nunavik pour un groupe de 14 élèves de 5e secondaire. C’est une grande aventure que ces jeunes entreprennent, car, en plus de leur périple vers le Grand Nord, le groupe a suivi plusieurs ateliers de préparation et, pour la deuxième fois, ils accueilleront des élèves Inuits au Collège. Samuel C. Brière, animateur de l’engagement communautaire, et Chloé Guérin Gosselin, enseignante d’univers social, chapeautent le projet et accompagnent les élèves à chacune des étapes de l’aventure.

C’est au début de l’année scolaire, en septembre, que M. Brière a présenté le projet aux élèves et à leurs parents. Plusieurs d’entre eux étaient enthousiastes à l’idée de vivre une telle aventure! Un projet de cette envergure nécessite évidemment une préparation et une implication exceptionnelles. Les jeunes sélectionnés pour prendre part à l’aventure étaient prêts à s’investir dans une solide formation en amont afin de vivre au mieux cette expérience. Les thèmes et les objectifs des ateliers étaient variés : comprendre les différences culturelles, apprendre le processus d’adaptation, renforcer la cohésion du groupe, découvrir le peuple inuit et ses réalités, etc. Les jeunes ont également participé à un atelier avec Mélanie Lumsden, coordonnatrice du Centre étudiant des Premiers Peuples de l’Université de Montréal et membre de la nation Inuvialuit et ils ont suivi une leçon d’inuktitut.

Quelques jours avant le grand départ nous avons rencontré Zarina et Olivier, les ambassadeurs du groupe, pour en apprendre plus sur le périple qu’ils entreprennent.

Dernier atelier : une leçon d’inuktitut

Premièrement, qu’est-ce qui vous a donné envie de participer au projet?

[Zarina] Le projet nous a été présenté en classe par M. Brière qui nous a montré des photos des voyages précédents et nous a expliqué un peu en quoi consistait le projet. Si le voyage est destiné aux élèves qui aiment le plein air, il présente aussi et surtout un volet d’engagement communautaire et social. Bon nombre des ateliers suivis avant le départ étaient liés à des enjeux environnementaux ou politiques. Il faut donc aussi avoir cet intérêt-là. Les deux premières années du projet, seul Brébeuf allait à Kangiqsujuaq et c’est la première fois, cette année, que le projet prévoit un échange. Après notre voyage, nous allons recevoir les étudiants ici, en avril.

C’est quelque chose qui m’intéresse car je me suis toujours impliquée au niveau communautaire et c’est vraiment une occasion incroyable. J’aime aussi le fait que ce soit encadré de manière scolaire : ça change beaucoup le voyage. Ce n’est pas vraiment un voyage qui se fait seul et même si on le fait en groupe, notre préparation joue un grand rôle dans l’expérience que l’on va avoir. C’est une chance de le faire avec l’école, que ce soit vraiment organisé, planifié, avec un groupe d’élèves de mon âge et que l’on fasse un échange avec des étudiants de notre âge ici, je pense que c’est ça qui m’intéresse.

[Olivier] Moi aussi j’aime le côté de l’engagement communautaire, apprendre de cette culture dont je sais vraiment peu de chose. C’est très important d’être conscient de tout ce qui se passe dans notre pays et c’est aussi quelque chose que nous devons apprendre à connaître, car cela fait partie de la réalité du Québec. Cette culture est tellement riche et elle est en quelque sorte parvenue à survivre au fil des années dans ce territoire complètement aride où la faune et la flore est très différente d’ici.

Le volet plein air m’a vraiment poussé à adhérer au groupe parce j’aime beaucoup cela. Je me compte chanceux de pouvoir vivre cette expérience unique! Comme c’est peut-être quelque chose que je n’aurai jamais la chance de refaire dans ma vie, il fallait que je le fasse. Quand j’ai vu les photos que M. Brière nous a montrées en classe, je me suis dit : c’est comme un miracle, c’est une des sept merveilles du monde, c’est le blanc à perte de vue!

Que retenez-vous des ateliers de préparation que vous avez suivis?

[Zarina] Les ateliers se sont déroulés de manière progressive. Au début, on a appris à se connaître comme groupe : c’est super intéressant et important pour un voyage comme celui qu’on va faire. La première journée, on a reçu un carnet puis tout au long de notre voyage on va prendre des notes de ce que l’on voit, ce que l’on retient. On a ensuite abordé le sujet de la culture autochtone et notamment la culture inuite. On a effectué des recherches sur divers sujets : l’art, les tatouages, la politique, la nature, etc. On a ensuite présenté le fruit de nos travaux au reste du groupe. On a regardé quelques documentaires, dont Grizzlies, et après le visionnement on a échangé en groupe.

[Olivier] La dernière journée avant les vacances de Noël, on a rédigé une carte et on a envoyé des suggestions de musique pour qu’ils puissent savoir ce que l’on écoute ici. On a récemment organisé un atelier sur les enjeux politiques, économiques, sociaux, environnementaux, sur tout ce qui se passe avec les organismes et les entreprises qui travaillent pour le Nunavik.

Y a-t-il des choses qui vous ont surprises pendant vos formations?

[Olivier] Il y a eu de bonnes et de moins bonnes choses… Une chose qui a été choquante pour moi tient aux problèmes auxquels sont quotidiennement confrontés les jeunes. Je ne pensais pas que cela soit possible. Quand on en a parlé, moi, ça m’a vraiment choqué. J’imaginais des jeunes comme nous, comme notre groupe. On a tellement de chance qu’on ne réalise même pas ce que d’autres adolescents comme nous peuvent vivre. C’est ce qui m’a vraiment frappé. Par ailleurs, le bon côté est que je pense que ce sont des jeunes comme nous, mais dont la culture est différente.

On peut visionner tous les films, tous les documentaires qu’on veut, puis en parler autant qu’on veut… mais on ne peut pas vraiment se préparer. Il faut le vivre pour mieux comprendre. Je pense que nous sommes chanceux de vivre une telle expérience à notre âge, à 16 ans, pour faire preuve d’un peu plus d’humilité dans la vie, et bénéficier de tous les apprentissages que procure une telle expérience.

Qu’avez-vous hâte de découvrir?

[Olivier] Pour ma part, j’ai vraiment envie de rencontrer les étudiants. J’adore faire de nouvelles rencontres. Peut-être pourrons-nous nouer des amitiés que nous pourrons garder à distance.

[Zarina] J’ai aussi hâte de rencontrer les élèves parce que j’aime me faire des amis. J’ai hâte de juste parler de tout ce dont on peut parler, de nos vies, de nos expériences… L’idée de faire du plein air dans une région si éloignée et vraiment complètement différente de ce qu’on connaît ici m’excite aussi beaucoup.

[Olivier] Je pense que le plus grand contraste tient au fait que nous sommes des étudiants citadins : nous habitons dans une ville, nous avons grandi dans la région de Montréal. C’est une grosse ville, une ville qui est toujours bruyante. Eux, ils vivent à un endroit qui est presque le contraire : c’est plus silencieux, plus calme. Alors je pense que pour nous ça va peut-être être un choc… et quand ils vont venir nous voir, ça va être un choc pour eux aussi!

Avez-vous des appréhensions?

[Zarina] Ce qu’il importe de garder en tête, c’est que plus le voyage approche, plus il y a des choses auxquelles je ne peux pas me préparer. Je ne peux pas savoir comment je vais me sentir. Nous n’aurons pas vraiment de téléphone ni de connexion Internet. Comme nous vivons quotidiennement avec cela, comme nous pouvons appeler nos parents ou texter nos amis quand nous le voulons, je ne sais pas vraiment comment je vais réagir si je suis privée de ces moyens.

[Olivier] Moi, j’ai un peu hâte de me déconnecter du monde! C’est quelque chose que j’adore, personnellement, me déconnecter à l’occasion. Vivre ma vie, vivre le moment présent, c’est un peu cliché! Je suis sûr qu’il va y avoir des situations auxquelles je n’ai pas été préparé, mais je ne pense pas avoir de crainte particulière. Je sais qu’il va y avoir des surprises et je sais que je vais réagir de la meilleure façon possible. J’ai hâte aux surprises parce que même si je commets des erreurs, même s’il y a des choses que je ne comprends pas encore, je vais quand même apprendre quelque chose. J’aborde cette expérience avec un esprit de curiosité et je veux simplement découvrir quelque chose de nouveau.

Quel est le lien le plus évident pour vous entre ce voyage et vos études au Collège?

[Olivier] Une chose que j’ai découverte à Brébeuf c’est cette soif de découverte, de curiosité et aussi la façon de tisser des liens. Au Collège, on est séparé selon le profil et je fais partie du profil latin. Il y a un petit groupe avec qui j’ai des liens forts et je pense que la situation pourrait être un peu similaire dans le cas de notre voyage. Nous formons un petit groupe qui va à la rencontre d’un autre petit groupe : peut-être ne passerons-nous pas beaucoup de temps ensemble dans l’avenir, mais nous pourrons toujours compter sur cette amitié qui va durer. Je pense que c’est un peu ce que Brébeuf veut créer, dans l’esprit de ses valeurs et de l’ouverture sur le monde.

[Zarina] J’ai l’impression que ce voyage est différent de l’expérience que j’ai eue à Brébeuf. Je pense que ça va nous donner la chance de découvrir puis d’apprendre de manière vraiment plus libre et très différente de ce qu’on a vécu au cours des cinq dernières années. Je sais aussi que l’engagement communautaire représente une valeur importante au Collège et que s’offrent à nous beaucoup d’occasions pour nous engager. Ce voyage est l’une de ces occasions.

À quelques jours de votre départ, dans quel état d’esprit êtes-vous?

[Olivier] On fait un décompte, tout le monde est vraiment excité Les autres membres du groupe m’ont dit qu’ils n’arrivent vraiment pas à y croire : dans 14 jours, on va être au Nunavik!

[Zarina] Pour moi, c’est la même chose. C’est arrivé tellement rapidement que j’ai de la difficulté à croire qu’on part dans quelques jours. On sait aussi qu’il est difficile de savoir combien de temps durera le trajet à cause des conditions météorologiques.

Comme nous faisons partie du comité du carnaval de Brébeuf, d’ici jeudi, avant notre départ vendredi, nous bouclons les derniers préparatifs. C’est donc un peu étrange de penser que du jour au lendemain, nous allons délaisser la précipitation propre au carnaval pour nous retrouver pratiquement dans un autre monde!