Dans les cours de publicité du programme Arts, lettres et communication d’Étienne Bégin-Thibault, les étudiants doivent concevoir et réaliser une publicité sociétale en utilisant la photographie. Avec un certain nombre de contraintes créatives et temporelles, les étudiants regroupés en équipe se mettent dans la situation de travailler dans une agence de publicité.

Ils doivent également suivre les différentes étapes de conception et de réalisation d’une publicité, entre autres :

  • L’élaboration du concept publicitaire;
  • La présentation à un client fictif;
  • Le travail avec un photographe professionnel;
  • La mise en scène et la prise de vue photographique.

Nous avons choisi d’observer le développement des projets de trois équipes d’étudiants : Maria Nedelcu et Anna Mariaud De Serre, Adrien Lodygensky et Darius Laprise, ainsi que Jeanne Strouvens et Mathilde Meunier.


Les étapes de création d’une publicité sociétale

1. Choisir une cause et un organisme

Une mise en situation : les élèves travaillent dans une agence de publicité et doivent créer, en équipe de deux, une publicité photo pour un organisme québécois reconnu afin de faire rayonner sa cause. Les équipes sont libres dans leur choix d’organisme.

Les trois équipes suivies, lors de la présentation du projet par leur professeur, hésitaient entre deux causes importantes à leurs yeux.

Maria et Anna hésitaient entre la prévention du suicide et l’aide aux personnes transgenres. Elles ont finalement tranché pour la deuxième option « parce ce qu’il s’agit d’un sujet qui a besoin de sensibilisation dans notre société d’aujourd’hui. »

Après avoir considéré l’obésité, Adrien et Darius ont opté pour la cyberdépendance avec l’organisme PAUSE  : « C’est une cause qui, selon nous, touche un énorme pan de notre société et c’est un problème qui est souvent sous-dramatisé. Nous croyons sérieusement que la cyberdépendance est une menace pour la jeunesse, la créativité, la santé et la liberté. »

Adrien et Darius ont opté pour la cyberdépendance avec l’organisme PAUSE

La troisième équipe, celle de Jeanne et Mathilde, a songé à la cause de l’itinérance, mais a finalement choisi la mode éphémère ou fast fashion et l’Association québécoise du commerce équitable. Selon elles, « il s’agit d’un sujet important, actuel et grave dont on ne parle que trop peu. »

2. Élaborer un concept

Les contraintes

Évidemment, tout projet vient avec des contraintes :

  • La publicité doit s’adresser à un public âgé de 17 à 25 ans;
  • Le genre est libre;
  • La photo peut être en couleurs ou en noir et blanc.

Toutefois, le plus grand défi de ce projet est qu’aucun texte ne peut être ajouté en postproduction. Pas même le logo de l’organisme. Il est permis d’avoir du texte uniquement s’il est intégré lors de la prise de photo, comme des mots écrits sur le corps ou une affiche.

Les équipes ont seulement 30 minutes pour réaliser la photo le jour de la séance photo avec un photographe professionnel. Ces 30 minutes comprennent :

  • la préparation (décors et accessoires, costumes, maquillages, etc.);
  • la prise de photos;
  • le nettoyage et le ramassage pour laisser la place à la prochaine équipe.

Les étudiants doivent donc arriver plus tôt à leur séance photo s’ils savent que la mise en place de leur concept prendra beaucoup de temps. Leur professeur leur a fortement suggéré d’arriver 20 minutes d’avance ce jour-là.

Élaborer un concept, c’est penser à tout ou presque!

Les différents éléments à prendre en compte

Lors de l’élaboration de leur concept, les étudiants doivent penser à tous les éléments possibles :

  • Casting (qui pose sur la photo, combien de personnes nécessaires);
  • Éclairage (type, angle, couleurs);
  • Cadrage (gros plan, plongée, etc.);
  • Lentille (grand-angle, fish eye, etc.)
  • Maquillage et costumes;
  • Accessoires;
  • Décor (meubles, arrière-plan, projections, etc.);
  • Etc.

3. Rencontrer le photographe professionnel

Les étudiants ont pu rencontrer, pendant une heure, le photographe professionnel avec qui ils travailleront à la réalisation de leur concept.

Ancien de Brébeuf et photographe pour de nombreux évènements de l’institution, Maxime Côté est le photographe attitré à ce projet depuis de nombreuses années déjà. C’est lui qui s’occupera également des retouches, mais seulement dans les cas où celles-ci sont absolument nécessaires.

Maxime Côté pendant sa présentation – Photo : Julie Gagné

Pendant sa présentation, M. Côté a montré des projets des années antérieures et a expliqué ce qui a fonctionné ou non pour chacun eux. Il a de plus énuméré le matériel disponible au studio comme les lentilles, le projecteur, les toiles de fond (backdrops), les types de lumière, etc. Il a donné aussi des conseils de préparation, toujours en donnant des exemples de problèmes potentiels.

Par exemple, si le concept nécessite de lancer ou de verser quelque chose, comme des confettis ou de la peinture par exemple, l’équipe doit penser à un moyen de tout ramasser rapidement. Autant entre les prises qu’à la toute fin pour céder le studio à l’équipe suivante.

Maxime Côté présente une ancienne publicité conçue par d’anciens étudiants –  Photo : Julie Gagné

M. Côté a insisté sur un point important. Si les élèves devaient retenir une chose de cette rencontre : c’est l’importance de la préparation.

À la fin de la rencontre, les étudiants ont pu lui poser des questions techniques spécifiques à leurs projets.

4. Faire une présentation spéculative (pitch)

Ici, il s’agit de simuler une véritable présentation de concept à un client. Les équipes ont chacune 7 minutes pour vendre leur idée au client potentiel (leur professeur, dans ce cas-ci).

Le « pitch » de Maria Nedelcu et Anna Mariaud De Serre – Photo : Julie Gagné

Voici les différents points à couvrir lors de leur pitch :

  • La cause et l’organisme choisis;
  • Le concept et l’angle de traitement du sujet;
  • Les aspects techniques (éclairage, cadrage, lentilles, etc.);
  • Le matériel requis (décors, costumes, maquillage, accessoires);
  • Le choix des personnages, lorsqu’applicable.
Le « picht » de Jeanne Strouvens et Mathilde Meunier – Photo : Julie Gagné

Chaque équipe devait également remettre à leur professeur une maquette de leur concept (dessin ou collage de 11 x 17 pouces) et un document écrit de leur présentation comprenant les éléments présentés lors du pitch.

Le but de l’exercice : convaincre le client (leur professeur) tout en restant ouvert à ses commentaires et suggestions (ouverture à la collaboration).

Les élèves étaient également jugés sur la formulation de leurs idées (énonciation, rythme, émotion, qualité du français) et leur habillement (ont-ils l’air professionnels?).

On évalue ainsi leurs idées et à quel point ils ont pris l’exercice du pitch au sérieux.

Comment se déroule un pitch? Quelles sont les étapes?

  • Introduction;
  • Présentation des membres de l’équipe;
  • Présentation de la cause et de l’organisme choisis, ainsi que la raison de ces choix;
  • Description du concept de la publicité dans ses grandes lignes;
  • Description des détails avec le choix des personnages, des couleurs, du type d’éclairage, du cadrage, etc.;
  • Explications techniques comme la lentille utilisée, l’éclairage et le décors;
  • Conclusion;
  • Récapitulatif rapide du concept;
  • Remerciement du client pour son écoute;
  • Commentaires du professeur et remue-méninges pour clarifier le message de la publicité autant que possible;
  • Remise de la maquette et du document avec les détails du concept et de sa réalisation.
Le « pich » d’Adrien Lodygensky et Darius Laprise – Photo : Julie Gagné

Est-ce stressant de faire un pitch?

« Non. Le “pitch” est avant tout une idée de base pour une publicité. Il permet de progresser et de corriger le tir s’il y a lieu. Il permet de mettre sur papier et en mots une idée complexe. La présentation n’est qu’un bilan. » – Jeanne et Mathilde

« Pas vraiment. Nous croyons en notre concept et stresser pour un pitch ne fait que le rendre moins efficace. » – Adrien et Darius

« Non, parce qu’on connaît notre idée et on veut la partager. » – Maria et Anna

Avant leurs présentations, les étudiants ont toutefois posé plusieurs questions à leur professeur concernant ce qu’ils devaient faire ou non. Ce à quoi il a répondu, un peu taquin : « C’est votre présentation! ». On ne poserait pas ce genre de questions à un réel client potentiel, alors c’était sa façon de leur montrer qu’ils devaient jouer le jeu jusqu’au bout.

5. Retravailler le concept

Suite aux commentaires de leur professeur, les équipes ont dû ajuster leur concept de base. Certaines plus que d’autres; cela dépendait d’à quel point on pouvait reconnaître la cause choisie sans utiliser de mots.

Les concepts finaux de chaque équipe

  • Jeanne et Mathilde : la mode éphémère ou fast fashion. Une consommatrice aux yeux bandés fait dos à une travailleuse sous-payée et maltraitée qui lui tend un vêtement en rabais.
  • Maria et Anna : l’aide aux personnes trans. Un jeune homme s’identifiant comme femme se fait maquiller par son reflet, une femme, dans un miroir. Ce dernier reflète comment il aimerait se voir.
  • Adrien et Darius : la cyberdépendance. On voit un chirurgien absorbé par son téléphone en pleine chirurgie, du point de vue de l’intérieur du ventre du patient. L’équipe tient à recréer des intestins sur les rebords de la photo.

6. Préparer la fiche de réalisation pour le photographe

Il s’agit de la version finale du document préalablement remis au professeur lors du pitch de leur concept. Cette fiche doit être très claire et précise puisque c’est ce qu’utilisera le photographe pour réaliser la photo finale.

7. Faire la séance photo avec le photographe

Les étudiants étaient visiblement fébriles à leur arrivée au studio. Toutes les équipes suivies sont arrivées à l’heure pour leur séance photo avec leurs costumes et leurs accessoires.

D’abord, le concept de la photo est clarifié une dernière fois avec le photographe. S’en suivent des tests d’éclairage et des tests de photo en variant les poses. C’est pendant ces essais que quelques difficultés techniques ou problèmes se sont pointés.

Séance photo avec Jeanne et Mathilde – Photo : Julie Gagné

Adrien et Darius

Dans le cas d’Adrien et Darius, le photographe avait de la difficulté à bien cadrer le modèle (Adrien) sans voir la « boîte à saucisses », qui simulait des intestins humains. Le photographe a finalement opté pour une lentille un peu plus petite afin de pouvoir la faire entrer dans la boîte. Après quelques clichés, ce dernier a soulevé en riant que « là, [sa] lentille [allait] sentir la saucisse! »

Un autre petit défi à relever fut d’obtenir une réflexion de l’écran du téléphone assez visible dans les lunettes d’Adrien. L’idée de départ était de voir une réflexion du populaire jeu Candy Crush, mais cela ne paraissait pas assez sur les photos. La solution? Un écran entièrement rose avec la luminosité au maximum.

Peu de retouches auront été nécessaires pour leur photo : il suffisait de recadrer légèrement et rendre l’arrière-plan parfaitement blanc.

Séance photo avec Adrien et Darius – Photo : Julie Gagné

Maria et Anna

Ici, les jeunes femmes avaient oublié un détail important : leur concept impliquant un effet de réflexion, elles devaient avoir deux pinceaux identiques pour que l’effet du jeune homme maquillé par son reflet soit crédible. Après avoir fouillé dans leurs trousses à maquillage, une amie (qui posait pour la photo) a mis la main sur deux petits pinceaux à peinture qui ont finalement fait l’affaire.

Séance photo avec Anna et Maria – Photo : Julie Gagné

8. VOir enfin Les photos publicitaires réalisées

Après environ un mois de remue-méninges, d’effort, de travail d’équipe et de collaboration avec photographe, les étudiants ont finalement pu voir le fruit de leur travail.

La maquette d’Adrien Lodygensky et Darius Lapointe – Photo : Julie Gagné
La photo de la publicité d’Adrien et Darius. « Pour vrai, je suis vraiment content du résultat! » – Darius / « C’est vraiment ça que j’avais en tête! » – Adrien – Photo : Maxime Côté
La maquette de Maria Nedelcu et Anna Mariaud De Serre – Photo : Julie Gagné
La photo de la publicité de Maria et d’Anna. « Je trouve ça génial! » – Anna / « Moi aussi! » – Maria – Photo : Maxime Côté
La maquette de Jeanne Strouvens et Mathilde Meunier – Photo : Julie Gagné
La photo de la publicité de Jeanne et Mathilde : « Celle-là est vraiment bonne! » – Mathilde / « J’suis d’accord! » – Jeanne – Photo : Maxime Côté

de la théorie à la pratique

Un cours de publicité interactif, dynamique et professionnel

« [L’approche du professeur est] très intéressante et interactive. Le cours nous permet de mettre des mots sur des concepts que nous connaissions visuellement, mais sans la théorie. [Il] rend le cours dynamique avec des projets et des mises en pratique. [Ce cours] permet d’explorer des [angles] de l’art que nous n’avions pas explorés auparavant. Il permet de créer sous contraintes professionnelles et demande d’utiliser les termes et le développement du milieu. » – Jeanne et Mathilde

« [Le cours de publicité est] bien. Il a beaucoup d’ateliers pratiques qui nous aident à comprendre et à analyser la publicité. » – Adrien et Darius

Créer une publicité sociétale de A à Z

« Excitant et intimidant à la fois! De savoir que nos idées seront traitées avec professionnalisme et mises en image joliment est excitant. [La crainte] du manque de préparation ou de professionnalisme de notre côté est intimidant. » – Jeanne et Mathilde

« On pense que ce serait beaucoup plus intéressant si on faisait nos propres photos. » – Maria et Anna

«On trouve que c’est une super expérience très enrichissante. Mais nous aurions aimé avoir la possibilité de retoucher nos photos pour avoir plus de possibilités. » – Adrien et Darius

Les professeurs du programme ALC fortement appréciés de tous les étudiants

Adrien et Darius mentionnent qu’ils aiment particulièrement « les activités pratiques et la dynamique avec les autres étudiants ».

De son côté, Maria se sent vraiment à sa place dans le programme ALC.

« J’ai toujours aimé les arts. Au secondaire, je n’imaginais pas où je pouvais faire seulement ce que j’aime. Je ne me trouvais pas dans un monde de science à Brébeuf, mais je ne voulais pas changer d’école. Dans le programme ALC, je suis capable finalement de faire ce que je veux. » – Maria