Observatoire de géophysique

Les débuts

Un jour, en 1952, le P. Émile Cambron qui enseignait la physique au Collège Sainte-Marie, demanda au P. Maurice Buist de l’accompagner pour aller visiter l’observatoire de géophysique que dirigent les jésuites au scolasticat de Weston, près de Boston. Le P. Daniel Linehan, directeur de l’observatoire qui employait, à l’époque, une trentaine de personnes, les a très bien accueillis.

En revenant de Weston, le P. Cambron, toujours enthousiaste, suggéra d’acheter un petit appareil dont il paierait la moitié et de l’installer non pas au Collège Sainte-Marie, où il serait trop exposé aux secousses de la circulation à l’angle des rues Bleury et Dorchester, mais au Collège Jean-de-Brébeuf. Ils ont donc acheté, chez Sprengnether, à Saint-Louis, Missouri, un séismographe en tôle, très amateur, et ils l’ont installé au sous-sol, sous la « récréation des petits », derrière des murs de deux pieds et demi d’épaisseur. Dès le premier matin, un enregistrement d’un tremblement de terre qui venait d’Oaxaca, au Mexique fut réalisé. Le P. Maurice Buist fut tout excité.

La semaine suivante, sans s’annoncer, il se rendit à Ottawa, avec le P. Roméo Beauséjour, pour montrer l’enregistrement au docteur John Hodgson, directeur de la séismologie pour tout le Canada. Ils se présentèrent au bureau et le P. Buist lui dit que, curieux de voir si l’on pouvait enregistrer des tremblements de terre en pleine ville de Montréal, on avait installé un sismomètre d’amateur et obtenu le premier jour le séismogramme qu’il lui présentait. Il le regarde et, sympathique, nous dit que c’est pas mal, mais qu’il y a moyen de faire mieux. « Si vous voulez, je vous prête un sismomètre de première classe, un Willmore, du genre de ceux qu’on utilise dans toutes les stations du Canada. Apportez-le et installez-le n’importe où : il est à l’épreuve de l’eau. Creusez un trou pour installer l’appareil directement sur le roc, recouvrez le tout pour éviter les secousses par le vent et les animaux. Puis, reliez-le par deux fils à votre enregistreur ».

De retour d’Ottawa, le P. Buist a déposé le nouveau sismomètre dans la maison, au même endroit que le premier, mais il était tellement sensible qu’on pouvait dire à quelle heure les élèves montaient ou descendaient les escaliers pour les « repos ». Il a donc installé le sismomètre dans le jardin au milieu des fleurs, avec de bons résultats. Mais à la fin, il l’a mis à l’intérieur de la maison des Pères, au-dessous du rez-de-chaussée, vis-à-vis de la porte de sortie qui donne sur le jardin. L’enregistreur était recouvert d’une boîte de carton pour cacher la lumière. Le sismomètre a demeuré là tout l’automne de 1952 et toute l’année 1953, et c’est dans le sous-sol, en face du petit ascenseur de la résidence des Pères, dans une chambre noire improvisée, avec eau et évier, que, durant cinq ans, il a développé les sismogrammes.

Par la suite, invité à rencontrer M. Boyer à l’Hôtel Windsor, le P. Buist appris de lui que le gouvernement était prêt à les aider à enregistrer les tremblements de terre locaux, surtout pour faciliter la détermination des épicentres, et qu’il leurs donnerait un sismomètre, enregistreur, une horloge, des produits chimiques et du papier photographique. M. Boyer demanderait à M. Raymond Laplante, un bon ami, président de Quémont Construction, de leurs construire une voûte. Celui-ci accepta, mais sans trop d’enthousiasme.

Situé derrière la « maison des employés », sur la butte où le Père Recteur m’avait assuré qu’on ne construirait jamais, la voûte était terminée dès décembre 1955.

En septembre, le docteur P. L. Willmore, de l’observatoire d’Ottawa, apportait de la part du gouvernement un enregistreur à trois composantes, c’est-à-dire capable de recevoir sur trois feuilles de papier photographique l’enregistrement de trois sismomètres différents. Il apportait aussi un sismomètre Sprengnether, un galvanomètre à courte période, les produits chimiques et le papier photographique. Tous les appareils nécessaires pour enregistrer les séismes furent installés dans le local en face du petit ascenseur de la résidence des Pères, où un pilier de béton avait été construit pour recevoir l’enregistreur. Le nouvel enregistreur à trois composantes pourrait servir, si jamais on nous faisait cadeau de deux autres sismomètres, à enregistrer les mouvements du sol dans les trois directions, verticale, EW et NS.

Acquisition de nouveaux appareils

Le 23 janvier 1955, nous avions reçu d’Ottawa un chronomètre de marine de grande précision destiné à inscrire sur les sismogrammes le début de chaque minute et le début de chaque heure, en faisant dévier par un petit miroir le faisceau de lumière qui écrivait sur le papier photographique. Comme le papier avançait à raison de 60 mm par minute ou 1 mm par seconde, avec une bonne loupe, on pouvait lire le dixième de mm et donc donner l’heure d’arrivée des tremblements de terre au dixième de seconde. À partir de ce moment là, nous avons commencé à fournir des rapports au gouvernement américain et à Ottawa.

À l’été de 1955, on obtint un don de 5000$ pour l’achat d’instruments qui permettent de faire de la recherche. Grâce à ce don, nous avons acheté les trois sismomètres Benioff, qui étaient alors les meilleurs au monde. Nous les avons installés immédiatement dans la voûte, sur les deux piliers de béton bien soudés directement au roc, pour recevoir les vibrations du sol.

L’observatoire est installé au Pavillon Lalemant

En 1956, avec la première construction du Pavillon Lalemant, la voûte se trouvait en plein champ, entre l’endroit où on allait construire le Pavillon et la maison des employés. Un tunnel fut creusé entre la vielle partie du collège et le Pavillon pour relier sa tuyauterie au système central de chauffage.

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On en profite pour aménager dans ce tunnel un accès souterrain à la voûte, supprimant ainsi le petit cabanon hors-terre qui était peu esthétique.

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En 1957, on a aménagé les bureaux de la géophysique dans le Pavillon Lalemant, au-dessus de la bibliothèque existante, au bout du laboratoire de physique. Nous sommes demeurés là jusqu’à ce qu’on ait besoin de ce local pour en faire une classe, et qu’on nous installe au 4ième étage du Pavillon. Par la suite, pour des besoins de locaux pour la résidence des étudiants, nous avons déménagé dans un local au premier étage, près d’une sortie d’escalier. Nous y sommes toujours.

Au printemps de 1958, nous avons installé au Pavillon Lalemant les enregistreurs sismographiques. Une chambre avec un pilier en forme de E majuscule avait été préparée lors de la construction du Pavillon, pour recevoir les enregistreurs photographiques de séismologie. C’était juste en face des ascenseurs au sous-sol du Pavillon Lalemant. Un câble électrique reliait les sismomètres de la voûte aux enregistreurs. En arrivant au Pavillon, le P. Buist se fit fabriquer, par les élèves de l’École technique, un évier en acier inoxydable. Au lieu de payer 750$, comme le demandaient les spécialistes, çà a coûté seulement le prix du métal, soit 125$.

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Le P. Bourgeois à l’œuvre, dans le coin l’enregistreur à trois composantes, devant ce long cylindre, nous apercevons les trois lampes qui dirigent leurs faisceaux lumineux vers les trois galvanomètres de courte période. Plus à la gauche, les trois galvanomètres de longue période qui ressemblent à trois bougeoirs (1965)

L’heure exacte

En sismologie, il nous faut l’heure exacte au dixième de seconde. Le chronomètre de marine que nous avait procuré Ottawa en 1955, a été remplacé, en décembre de l’année suivante, par un autre de meilleure qualité et qui était vérifié chaque matin avec les signaux émis par un poste de radio qui donne l’heure exacte 24 heures par jour, à un millième e seconde près. Soit, par exemple, le poste CHU du Conseil national de Recherches ou le poste américain WWV.

Or, en avril 1958, la Société Radio-Canada garantissait de donner, à chaque heure, à l’aide d’un « bip », l’heure exacte à une fraction de seconde près, grâce à une horloge de grande précision dont elle était très fière.

En fait, on a installé tout simplement un relais actionné ici par l’horloge de Radio-Canada, rue Dorchester, au moyen d’une ligne téléphonique qui nous coûtait 96$ par année.

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M. Guimont, qui était chargé de l’heure à Radio-Canada, nous envoyait, en même temps que le signal, un courant alternatif de 60 cycles de un volt fabriqué par son horloge. Il a même construit un amplificateur de 60 watts, alimenté par un accumulateur d’automobile de 12 volts et actionnait ainsi, à une vitesse beaucoup plus régulière que le courant ordinaire, les moteurs synchrones des enregistreurs. M. Guimont nous envoyait par la poste, à la fin de chaque mois, la courbe de correction pour tous les jours du mois, parce que lui-même prenait l’heure au moins deux fois par jour sur « WWV » et pouvait ainsi tracer la courbe de correction de son horloge.

En mars 1961, nous arrivait d’Ottawa un camion contenant trois sismomètres de longue période, du type Columbia, fabriqués par Sprengnether, ainsi que trois galvanomètres de longue période (100 secondes de période) pour recevoir les signaux, de même qu’un enregistreur à trois composantes, ainsi que trois galvanomètres de courte période pour recevoir les signaux des trois Benioff.

Voici, sans leur enveloppe protectrice, et tels qu’installée sur leur socle de béton, les trois sismomètres Benioff (à gauche) et les trois sismomètres Columbia (à droite) (1965)
Voici, sans leur enveloppe protectrice, et tels qu’installée sur leur socle de béton,
les trois sismomètres Benioff (à gauche) et les trois sismomètres Columbia (à droite) (1965)

En 1967, Ottawa nous procurait une horloge au quartz fabriquée par Sprengnether et que nous vérifions tous les matins au centième de seconde, en utilisant les signaux horaires d’un des observatoires du Canada ou des États-Unis, qui donnent l’heure 24 heures par jour et, à longueur d’année, au millième de seconde près.

En octobre 1970, les gens d’Ottawa viennent nous installer un autre sismomètre vertical à courte période fabriqué par Geotech, avec un autre enregistreur appelé « Hélicorder ». C’est un enregistreur qui emploie non pas du papier photographique, comme nos autres enregistreurs, mais un papier spécial qui est noir et recouvert d’une cire complètement blanche. Cet enregistreur est visible dans une vitrine dans le corridor du premier étage du Pavillon.

Sismomètre Geotech
Sismomètre Geotech

En février 1974, les gens d’Ottawa nous demandent de leur laisser installer sur notre sismographe visuel, un système électronique qui leur permette d’enregistrer à Ottawa ce que nous enregistrons ici à Montréal.

P. Paul-Émile Tremblay devant l’hélicorder
P. Paul-Émile Tremblay devant l’hélicorder

En novembre 1983, le P. Buist, qui était le directeur de l’observatoire, suggérait au directeur général du collège de nommer pour le remplacer le P. Paul-Émile Tremblay, qui était déjà directeur adjoint depuis quelques années (arrivée en 1978).

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Directeur de l’observatoire : Jean Wilson
sismo@brebeuf.qc.ca
tél: 514-342-9342 poste 5155